« C’est
un honneur pour nous parce que Ciné Droit Libre est venu renforcer notre combat
pour la liberté d’expression. Cela va éveiller un peu plus les populations.
Nous vivons de nombreux problèmes mais les populations pensent que notre destin
est dans les mains de Dieu alors que souvent, un peu plus d’informations et de
sensibilisation leur aurait permis de comprendre que le développement et
l’épanouissement découlent de nos luttes. C’est ce que nous vivons ici à
Bogandé que vous êtes venu nous dévoiler autrement »,
Abdoul Kafaho Zoungrana. Les Burkinabè ont beaucoup à dire sur la vie de leur
pays, mais il leur manque très souvent le cadre approprié. Dori, Bogandé et
Zorgho furent des exemples parlants de ce grand besoin d’informations et
d’expression libre. Le festival Ciné Droit Libre l’a compris. Le 25 octobre à
Dori, le 26 à Bogandé et le 27 à Zorgho, les populations de ces villes ont vu
des films iconoclastes et débattu de problèmes brûlants du moment. Question de
l’exploitation minière dans le Sahel, l’oubli de la Gnagna profonde par le
Gouvernement et le non massif du Ganzourgou au sénat, tout y est passé. Sans
censure.
Que sera le Sahel après
l’exploitation minière ?
Le top de départ de la
phase décentralisée du festival Ciné Droit Libre a été donné le 25 octobre
dernier au ciné Welindé de Dori. Sorti en grand nombre pour la circonstance, les
populations de Dori ont pu voir des films comme « Prospérité sous
terre », un film qui traite de la question de l’exploitation de l’or au
Burkina ; « Boy Saloum », la révolte des Y en a marre au Sénégal
et de nombreux reportages sur les conflits agriculteurs et éleveurs ; les
étudiants expulsés des cités universitaires et un zoom sur le mouvement
« Balai citoyen ». Les débats qui ont suivi ces films ont tourné
essentiellement autour de la question de l’exploitation minière dans le Sahel,
ses conséquences sur l’environnement et le partage des revenus de l’or. C’est
ainsi qu’un jeune d’à peine 17 ans posa cette question existentielle :
« Que sera le Sahel après l’exploitation minière ? »
La Gnagna profonde
oubliée du Gouvernement
Après
Dori, l’équipe de Ciné Droit Libre a mis le cap le 26 octobre sur la ville de
Bogandé dans l’est du Burkina. Là, c’est une marrée humaine qui a pris d’assaut
le centre de loisirs Koamba Lankoandé sous le coup de 18h. « La femme des
arènes », « enfance
piégée », « Rasta rebelle », « Saré Peulh » sont entre
autres les films et reportages proposés au charmant public de Bogandé. Les
débats après films furent riches et divers. Le sentiment général qui s’en
dégage est celui de l’oubli de la province de la Gnagna par le Gouvernement
burkinabè ; en ce sens qu’il n’y a aucune bonne route qui la relie aux
autres provinces. Autre souci qui trouble le sommeil des Gnagnalais, le mariage
forcé ou les enlèvements de jeunes filles. « Ces projections nous
permettent de nous libérer de l’obscurité, de connaître nos droits et de
combattre pour la liberté. En général les gens parlent de la Gnagna métallique
et de la Gnangnan profonde et nous jeunes nous nous posons la question de
savoir si vraiment la Gnagna fait partie du Burkina. On se rend compte que
l’Etat a oublié la Gnangnan profonde », constate avec amertume Saïdou
Ouoba. Pour Mme Bourgou Assétou, « ces projections sont un véritable cours
d’éducation aux droits humains permettant de s’armer pour les combats
futurs ».
Pourquoi
tiennent- ils tant à mettre en place le sénat ?
La
dernière étape de cette première phase décentralisée de Ciné Droit Libre fut la
ville de Zorgho dans le plateau central. Comme dans les deux précédentes
villes, le public n’a pas marchandé sa mobilisation pour les écrans et débats
du festival Ciné Droit Libre qui s’est invité chez eux pour la première fois.
En plus des autres films diffusés à Dori et à Bogandé, ici le public a eu droit
au film qui indigne et révolte, « Biens mal acquis profitent
toujours ». Un documentaire qui lève le voile sur les pillages de
ressources par des présidents africains au détriment de leurs peuples qui
croupissent dans le dénuement et la misère extrême. Il n’en fallait pas plus
pour cristalliser les débats autour de la mise en place du sénat et de la
modification de l’article 37 de la Constitution. « Nous préférons des
médecins à la place des sénateurs », nous confie un jeune.
A
noter que tous ces débats dans les trois villes ont été assurés par l’artiste
musicien Sams’K le jah et le journaliste Newton Ahmed Barry. La deuxième étape
de la phase décentralisée se poursuivra les 1er et 2 novembre à
Ouahigouya et le 3 novembre dans la ville de Yako dans la région du nord.
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